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Résumé du bordel ambiant
11 juin 2008

Pas tout seul dans sa tête

La première fois que j’ai rencontré Nono, il devait avoir dans les 5 ans. J’étais en train de bricoler ma moto sur le trottoir devant chez moi quand il s’approcha les yeux grands comme des billes, l’air curieux de tout et avec une tête à me demander de lui dessiner un mouton. Mais tout de suite, j’ai bien compris que le dessin de mouton ça risquait pas. Parce que Nono il était un peu différent et qu’il avait du mal avec le langage.
D’ailleurs regarde… j’ai toujours pensé que cette scène, c’était le film de notre premier contact.

Nono, c’est pas son diminutif, il s’appelle pas Bruno ou Norbert. C’est juste parce que pendant très longtemps au grand désespoir de ses parents, le seul mot qu’il a su dire, c’était ça, Nono. Comme un surnom qu’il se serait donné tout seul.

Puis est venue sa première phrase. Il devait avoir 6 ou 7 ans. C’était le jour où la moitié de sa maison a brûlée. Ses parents en train de faire des courses avaient laissé Nono jouer tout seul. Grave erreur, vu l’attroupement de voisins sur le trottoir d’en face et les flammes énormes qui montaient jusqu’au toit. C’est quand les pompiers l’ont sorti du brasier et apporté à ses parents en pleurs que Nono a prononcé sa première suite de mots. Il a tendu la main, montré le briquet jetable qu’il tenait et dit bien fort, l’air tout fier de lui : "A feu moa !.. A feu moa !".

Bref autant être honnête, quand les gens du quartier croisent les parents de Nono, j’ai bien l’impression qu’ils se disent en les regardant d’un air désolé, que le fruit de leur amour, il est un peu confit.

C’est pas mon cas. Nono et moi on s’aime vraiment bien. Aujourd’hui il a 16 ans. Mais il en fait à peine 11 ou 12. Et depuis il a appris à parler. Alors quand je bricole dans mon garage il vient souvent taper la causette. Je le fais rire en m’énervant à cause de mes outils qui font exprès de se cacher pour que je les retrouve jamais. Et lui, rien qu’en m’exposant son étrange vision du monde. Et plus je lui parle, plus je mesure à quel point il a une intelligence bien à lui, même s’il est bon dernier de sa classe d’adaptation.

En ce moment, il est sur un nouveau projet. Vu qu’il a bien compris que c’est pas grâce à l’école qu’il trouvera sa place dans la société, il a décidé de la trouver tout seul. Dans le petit studio qu’il habite dans le fond du jardin chez ses parents, il a construit tout un tas de cages pour se lancer dans la production de souris à l’échelle industrielle. "Parce que tu comprends, les souris ça fait plein de petits très vite". Il a compté qu’avec juste un couple et un temps de gestation aussi court que celui des rongeurs, au bout d’un an, il pourra avoir des milliers de souris. Voire plus.

Alors je lui demande s’il a réfléchi qu’avec un tel élevage, il pourra jamais partir en vacances.
Il me répond qu’il s’en fout, que les voyages il peut les faire dans sa tête.

Je l’interroge sur ce qu’il va faire de toutes ces souris, que ça sert à rien les souris.
Il me dit que c’est pas grave d’avoir à vendre des trucs qui servent à rien, qu’il suffit de donner l’envie aux autres de les acheter.

Je lui dis que c’est risqué d’espérer faire un élevage géant dans son studio de fond de jardin, qu’il va manquer de place, qu’il saura plus comment les nourrir.
Il m’explique avec ses mots que c’est pas plus con que de baser une économie mondiale sur la croissance quand on vit sur une planète à taille limitée.

Alors tu vois, c’est vrai que Nono il est un peu malingre, qu’il mélange un peu les syllabes, que parfois il a des idées un peu bizarres. Mais il est pas plus con qu’un autre. Et comme je pense qu’avec lui, limite ça marcherait pas plus mal, j’en ferais bien le président de ma République.
Au moins lui, il me ferait sourire d’un clin d’œil qui brille et de son regard amusé.

Cremerdi, jour des petits.
Bande son : les Maracas (nouvellement Rhinocérose) "C'est plus fort que moi"

Je ne sais pas cacher mes sentiments, que je sois triste ou bien content.
Juste un peu exubérant pour les gens bien pensants.
Un peu trop débordant, trop fermé par moments.
Je n'arrive pas à cerner les limites de ma réalité.
Vivons-nous réellement ici-bas ou sommes-nous simplement en train de rêver ?

Je ne sais pas, c'est plus fort que moi
Je n'explique pas, ne me demandez pas pourquoi.
Je ne sais pas, c'est plus fort que moi.
Non je n'explique pas, ne me demandez pas pourquoi.
Pourquoi ?... Pourquoi c'est plus fort que moi.

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Commentaires
L
C'est un joli texte en tous les cas!
Y
cece. Pour ta réputation, on va dire "bonne réponse".<br /> <br /> L'autre et la marie. Merci. Et de rien.
L
Merci.
C
"oublie que t'as aucune chance, fonce. On sait jamais, sur un malentendu..." J.C. Dus
L
Un post avec une écriture pleine de maturité... je croirais être sur un autre blog que le tien, c'est assez déconcertant mais très plaisant.
Résumé du bordel ambiant
  • Les gentils garçons marchent à pied et vont au ciel. Les mauvais garçons roulent à moto et vont partout. Donc... La vie et la mort, les femmes et la coiffure, le sexe et la moto. Mais aussi le dessin, les cerfs-volants et la mer. (Et la brouette javanaise
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